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EU Law

Protection du consommateur - Notion d'"établissement commercial" - Caractère "habituel" de l'activité exercée

Le droit de la consommation qui a considérablement fleuri ces dernières décennies, notamment sous l'implusion du législateur européen, organise une protection particulière au bénéfice du consommateur qui conclut un contrat "hors établissement", c'est-à-dire en dehors de l'établissement commercial du vendeur. Cette protection prend la forme d'un devoir d'information renforcé et, surtout, d'un droit de rétractation dans le chef du consommateur. 

Dans un arrêt du 8 août 2018, la CJUE a eu l'occasion de se prononcer, à la demande de la Cour fédérale d'Allemagne, sur cette notion d'"établissement commercial", utilisée dans la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs. Spécialement de savoir si le stand d'une foire commerciale dans lequel un commerçant, qui n'est par ailleurs actif que sur des foires d'exposition, vend annuellement ses produits pendant quelques jours, pouvait être considéré comme répondant au critère selon lequel le professionnel doit, lorsque le site est qualifié de "meuble" par la directive, y exercer son activité “de manière habituelle” pour que celui-ci réponde à la notion d'établissement commercial.

Sur base d'une analyse pointilleuse de la directive 2011/83/UE, mais aussi de la directive 85/577 qui l'a précédée, la CJUE a considéré que "si le législateur de l’Union a prévu la protection du consommateur, en ce qui concerne les contrats hors établissement, dans le cas où, au moment de la conclusion du contrat, le consommateur ne se trouve pas dans un établissement occupé d’une façon permanente ou habituelle par le professionnel, c’est parce qu’il a estimé que, en se rendant spontanément dans un tel établissement, ledit consommateur peut s’attendre à être sollicité par le professionnel, de sorte que, le cas échéant, il ne saurait valablement soutenir par la suite avoir été surpris par l’offre de ce professionnel" (point 34 de l'arrêt). Elle en a conclu que l’expression "de manière habituelle" doit "être comprise comme renvoyant au caractère normal que revêt, sur le site concerné, l’exercice de l’activité en cause" (point 39 de l'arrêt).

La Cour conclut de ces considérations "que l’article 2, point 9, de la directive 2011/83 doit être interprété en ce sens qu’un stand ... tenu par un professionnel sur une foire commerciale, sur lequel il exerce ses activités quelques jours par an, est un « établissement commercial », au sens de cette disposition, si, au regard de l’ensemble des circonstances de fait qui entourent ces activités, et notamment de l’apparence de ce stand et des informations relayées dans les locaux de la foire elle-même, un consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé pouvait raisonnablement s’attendre à ce que ce professionnel y exerce ses activités et le sollicite afin de conclure un contrat, ce qu’il incombe au juge national de vérifier".

Un peu loin des intuitions, c'est donc la perception du consommateur moyen, compte tenu de l'ensemble des circonstances, qui constitue le critère déterminant du caractère "habituel" de l'activité exercée par le professionnel sur le site où il se trouve et partant, de la qualification de celui-ci comme "établissement commercial" au sens de la directive. Ce caractère habituel est, en revanche, parfaitement étranger à la question de savoir si le professionnel exerce, d'un point de vue objectif ou quantitatif, "habituellement" ses activités sur le site considéré.   

Cette lecture permet notamment d'expliquer, ainsi que le précise d'ailleurs le considérant 22 de la directive 2011/83, que "les magasins de vente au détail où le professionnel exerce son activité à titre saisonnier, par exemple pendant la saison touristique dans une station de ski ou dans une station balnéaire, doivent être considérés comme des établissements commerciaux, étant donné que ce professionnel y exerce son activité à titre habituel", tandis que "les espaces accessibles au public, tels que les rues, les galeries commerçantes, les plages, les installations sportives et les transports publics, que ledit professionnel utilise à titre exceptionnel pour ses activités commerciales, ainsi que les domiciles privés ou les lieux de travail, ne doivent pas être considérés comme des établissements commerciaux" (points 41 et 42 de l'arrêt). 

 

Olivier Creplet  

 

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